5 March 2025
Appel au Président de la République, pour une suspension immédiate et temporaire des travaux de construction de l’autoroute, pour une concertation inclusive, et pour répondre à la détresse des populations impactées.
Nous, les organisations et les représentants des populations victimes, signataires du présent communiqué, exprimons par la présente notre profonde préoccupation face au cri d’alarme et de détresse des populations rurales affectées par le projet de construction d’Autoroute reliant Antananarivo et Toamasina.
Depuis plusieurs semaines, des milliers de familles des communes concernées par les 80 km du premier tracé de ce projet d’autoroute vivent une situation dramatique, victimes d’expropriations forcées et abusives, ainsi de la destruction soudaine de leurs terres agricoles, principal pilier de leur survie. Les droits fondamentaux de ces populations sont violés. Cela se fait de manière chaotique, sans aucune indemnisation juste et préalable, en dépit des dispositions de l’article 34 de la Constitution, et sans mesures de compensation.
« Nous sommes désemparés face à des destructions massives menées sans notification, sans consultation ni préparation préalable. L’arrivée soudaine des bulldozers de SAMCRETE, rasant rizières et champs, a semé l’émoi et la panique au sein de notre communauté, qui se voit privée de ses principaux moyens de subsistance », déclaré Monsieur Nicolas Jean RAKOTONDRAMANA, représentant des villageois de la Commune d’Ambohimanga Rova.
Le projet présidentiel se veut être un levier de développement pour le pays et stimuler le développement économique. Pour atteindre cet objectif, il est indispensable que le projet soit un modèle, avec une approche inclusive, une vraie prise en compte des besoins économiques et sociaux fondamentaux des populations locales, et des mesures d’atténuation justes et appropriées.
Les populations impactées courent des risques immédiats d’insécurité alimentaire, aggravés par le non-respect de leurs droits fondamentaux. Ces risques ne menacent pas uniquement les familles qui cultivent des terres sur le tracé même de l’autoroute, mais aussi des communautés entières qui ont vu l’eau de leurs rizières remplacée par des torrents de boues rouges, du fait d’une gestion du chantier par SAMCRETE totalement inadaptée aux réalités du climat et de la topographie de Madagascar.
À ce jour, selon les doléances reçues, la communication restreinte autour du projet crée une grande incertitude auprès des habitants concernés. De plus, aucun tracé officiel et définitif n’a été officialisé, contrairement à toutes les normes de conduite d’un tel projet.
Actuellement, les responsables communaux ne semblent pas en mesure de fournir à leurs administrés des détails précis sur le tracé, ni un calendrier des travaux et des indemnisations. «Le tracé change constamment et reste très flou pour nous, les responsables et la société SAMCRETE prennent des décisions à leur guise. Et les travaux progressent à grande vitesse sans que nous puissions rien faire », déplorent les populations, qui subissent une gestion opaque et autoritaire du projet.
Nous, les OSC, ne remettons pas en cause la nécessité du développement des infrastructures. Toutefois, nous refusons qu’il se fasse au détriment des populations rurales et des principes de justice sociale. Le projet ne doit pas être synonyme d’expropriations brutales, ni d’insécurité alimentaire, de destruction des moyens de subsistance des citoyens ou encore de dégradation irréversible des écosystèmes naturels. Il a aussi le devoir de préserver des sites culturels, comme Ambohimanga Rova et ses villages historiques environnants.
« Nous sommes plongés dans l’incertitude et le désespoir, sans informations claires sur notre avenir face à ce projet. Malgré diverses doléances communautaires et nos efforts répétés pour instaurer un dialogue à tous les niveaux, aucune réponse satisfaisante ne nous a été fournie, ni des mesures concrètes concernant le cas d’Ambohimanga . Nous ne savons plus vers qui nous tourner ? », affirme Madame Sophie RAHARIMALALA, membre du comité local d’Ambohimanga Rova.
Ce cri de détresse et d’indignation restera-t-il sans réponse ? Les autorités vont-elles prendre en compte la souffrance des citoyens ? Il revient au Président de la République de faire le choix entre poursuivre son projet dans l’opacité ou restaurer la confiance de la population malagasy à travers la concertation pour la justice sociale.
Soucieux de ce qui précède, nous, les Organisations de la Société Civile, sommes unanimes pour demander au Président de la République :
- La suspension immédiate et temporaire des travaux et de la destruction des terres agricoles en attendant l’organisation d’un processus de concertation inclusive et une véritable consultation avec les populations concernées et les Organisations de la Société Civile ;
- La publication transparente de tous les documents de tracés officiels, arrêtés et validés en concertation avec les populations affectées par Commune, dûment tamponnés ;
- La mise en œuvre effective d’un plan clair de compensation et de réinstallation, conforme aux normes nationales et internationales, garantissant une indemnisation juste et équitable pour chaque famille touchée, qu’elle dispose ou non de titres formels, et ce, avant la poursuite de tous travaux ;
- Le respect des engagements en matière de protection de l’environnement et de sécurité alimentaire, en mettant en place des solutions alternatives pour préserver les terres fertiles et les moyens de subsistance des communautés rurales.
Nous attirons l’attention du FMI, de la Banque Arabe de Développement Économique en Afrique (BADEA) et de tout autre bailleur, sur la gravité des faits énoncés ici.
Le développement ne peut se faire en sacrifiant les droits, la dignité et la subsistance des citoyens. Nous vous appelons à agir pour répondre aux attentes légitimes des populations concernées. Nous vous invitons à écouter et constater par vous-même la situation de ces familles malagasy qui sont abandonnées par les plus hautes autorités du pays.
Nous savons que le Président de la République est soucieux du bien-être de la population. Nous demandons à ce qu’une délégation soit reçue à la Présidence pour aborder nos demandes et trouver des solutions constructives et satisfaisantes pour tous.

___ENGLISH
Appeal to the President of the Republic for an immediate and temporary suspension of the construction work on the motorway, for inclusive consultation, and to respond to the distress of the populations affected.
We, the organizations and representatives of the victimized populations, signatories of this press release, hereby express our deep concern at the cry of alarm and distress of the rural populations affected by the highway construction project linking Antananarivo and Toamasina.
For several weeks, thousands of families in the municipalities affected by the 80 km of the first route of this highway project have been living in a dramatic situation, victims of forced and abusive expropriations, as well as the sudden destruction of their agricultural land , the main pillar of their survival. The fundamental rights of these populations are being violated. This is being done in a chaotic manner, without any fair and prior compensation, despite the provisions of Article 34 of the Constitution, and without compensation measures.
” We are helpless in the face of massive destruction carried out without notification, consultation or prior preparation. The sudden arrival of SAMCRETE bulldozers, razing rice fields and fields, has caused shock and panic in our community, which has been deprived of its main means of subsistence ,” said Mr. Nicolas Jean RAKOTONDRAMANA, representative of the villagers of the Commune of Ambohimanga Rova.
The presidential project aims to be a lever for development for the country and to stimulate economic development. To achieve this objective, it is essential that the project be a model, with an inclusive approach, a real consideration of the fundamental economic and social needs of local populations, and fair and appropriate mitigation measures.
The populations affected run immediate risks of food insecurity, aggravated by the failure to respect their fundamental rights. These risks do not only threaten families who cultivate land on the very route of the highway, but also entire communities who have seen the water in their rice fields replaced by torrents of red mud, due to SAMCRETE’s management of the site that is totally unsuited to the realities of Madagascar’s climate and topography.
To date, according to the complaints received, the limited communication around the project creates great uncertainty among the residents concerned. In addition, no official and definitive route has been made official , contrary to all the standards for conducting such a project.
Currently, municipal officials do not seem able to provide their constituents with precise details on the route, nor a schedule of works and compensation. ” The route is constantly changing and remains very unclear to us, the officials and the SAMCRETE company make decisions as they please. And the work is progressing at high speed without us being able to do anything ,” deplore the populations, who are subjected to opaque and authoritarian management of the project.
We, the CSOs, do not question the need for infrastructure development. However, we refuse that it be done to the detriment of rural populations and the principles of social justice. The project must not be synonymous with brutal expropriations, nor with food insecurity, destruction of citizens’ livelihoods or irreversible degradation of natural ecosystems. It also has a duty to preserve cultural sites, such as Ambohimanga Rova and its surrounding historic villages.
“ We are plunged into uncertainty and despair, without clear information about our future in the face of this project. Despite various community grievances and our repeated efforts to establish dialogue at all levels, no satisfactory response has been provided to us, nor concrete measures concerning the case of Ambohimanga. We no longer know who to turn to? ”, says Mrs. Sophie RAHARIMALALA, member of the local committee of Ambohimanga Rova.
Will this cry of distress and indignation remain unanswered? Will the authorities take into account the suffering of citizens? It is up to the President of the Republic to make the choice between continuing his project in opacity or restoring the confidence of the Malagasy population through consultation for social justice.
Concerned about the above, we, the Civil Society Organizations, are unanimous in asking the President of the Republic:
- The immediate and temporary suspension of work and the destruction of agricultural land pending the organization of an inclusive consultation process and genuine consultation with the populations concerned and Civil Society Organizations;
- The transparent publication of all official route documents, drawn up and validated in consultation with the populations affected by the Commune, duly stamped;
- The effective implementation of a clear compensation and resettlement plan, in line with national and international standards, guaranteeing fair and equitable compensation for each affected family, whether or not they have formal titles, before any work continues;
- Meeting commitments to environmental protection and food security, by implementing alternative solutions to preserve fertile land and the livelihoods of rural communities.
We draw the attention of the IMF, the Arab Bank for Economic Development in Africa (BADEA) and any other donor to the seriousness of the facts stated here.
Development cannot be achieved by sacrificing the rights, dignity and livelihood of citizens. We call on you to act to meet the legitimate expectations of the populations concerned. We invite you to listen and see for yourself the situation of these Malagasy families who are abandoned by the highest authorities in the country.
We know that the President of the Republic is concerned about the well-being of the population. We ask that a delegation be received at the Presidency to address our requests and find constructive and satisfactory solutions for all.